30 octobre 2007

Putain, c'est la guerre!

Par Patrick Tillard
Présentation de l'œuvre
Ressource bibliographique: 
Putain, c'est la guerre.png

Poétique est un mot insuffisant pour caractériser la force corrosive et pétillante de Putain, c’est la guerre. Ce petit livre renouvelle le plaisir subversif et la richesse allusive de l’ironie dans un milieu social et idéologique américain qui en avait bien besoin à partir de 2001.

Écrites et dessinées dans le contexte du choc qui a suivi les attentats contre les tours du World Trade Center de Manhattan, ces bandes commentent « in vivo » la prolifération et les pièges des discours définitifs de l’équipe politique au pouvoir aux États-Unis, que ce soient les lois sécuritaires, les retombées de la lutte contre le terrorisme, les absurdités et les énigmes des nouvelles lois répressives, ainsi que l’ensemble des « lessivages » de cerveau. Le refus de la « lobotomisation », lorsqu’il se tourne, comme ici, vers ces ennemis que sont les discours politiques et le matraquage idéologique, se préoccupe de ce qui, dans leur puissante efficacité, dupe leurs victimes. Les réflexions acerbes des personnages naviguent entre illusion et vérité et cette pratique périlleuse et obstinée de l’ironie produit, pour le lecteur, la révélation d’un nouveau système de références et des compréhensions insolites sur qui est trompé et comment. Un système de décodage se met en place avec la simulation merveilleuse de l’ironie et induit le lecteur à accompagner le mouvement, à ne pas se cantonner à moduler sur un mode complice la pieuse tromperie guerrière en cours. David Rees constate les éléments empilés du décor schizophrénique qui emprisonne une population blessée, il en révèle la facticité et l’hypocrisie afin que les protagonistes puissent se réconcilier avec eux-mêmes. Peut-être plus qu’à toute autre perspective narratrice, c’est d’abord à une forme de réconciliation personnelle, à une pacification interne, à la naissance d’une réflexion critique refondatrice et non anesthésiée, que nous assistons dans ces bandes.

Site de la parution initiale sur le web: http://www.mnftiu.cc/mnftiu.cc/war.html (consulté le 23/11/2006) Les bandeaux y ont été publiés du 10/09/2001 au 10 février 2006, une adaptation livre a suivi : Get your war on, Skull Press, Brooklyn, N.Y., 2002.

Consulter aussi : http://www.pastis.org/jade/cgi-bin/reframe2.pl?http://www.pastis.org/Jad... Et http://www.largeur.com/expArt.asp?artID=1300
Précision sur la forme adoptée ou le genre: 
Bande dessinée sous forme de bandeaux initialement publiés dans un blog puis édités.
Précision sur les modalités énonciatives de l'œuvre: 

L’originalité du travail graphique consiste à reprendre dans presque toute l’oeuvre les mêmes dessins, les mêmes personnages figés dans des poses de bureaux avec très peu de variations graphiques si ce n’est que les cadrages des personnages fluctuent.

Le dessin par lui-même a peu d’intérêt, il pourrait être repris de dessins factuels illustrant des méthodes de maintien, par ex. Il n’y a donc aucun intérêt graphique ou stylistique. L’intérêt vient de la répétition et de son martèlement, du travail sur le langage et de la qualité des dialogues.

Quelques personnages à leur bureau, toujours les mêmes, discutent par téléphone du contenu des informations politiques et militaires du moment pendant que leurs masques d’employés formatés par le système tombent. Trois cases par bandes et tradition « des doppel-gängers du clip-art », («le Doppelgänger n'a pas d'ombre et son image n'est pas reflétée par un miroir ou de l'eau. Il est supposé donner des conseils à la personne qu'il imite, mais ces conseils peuvent induire en erreur et être malicieux. Ils peuvent aussi en de rares occasions semer la confusion en apparaissant devant les amis et proches de leur victime ou en induisant des idées dans l'esprit de leur victime. » (http://fr.wikipedia.org/wiki/Doppelg%C3%A4nger)