L’urgence est là, de dévoiler toute l’étendue du désastre : les médias ! Anéantie est l’armée des barbares, et la caméra saisit cet anéantissement. Nous, nous ne la saisissons pas, mais la caméra, elle, le saisit. Elle le saisit même plus vite que nous, ce qui se passe. (p. 56)
Cris, damnation, dégoût sans fond, votre nom ? Vous m’accompagnez illico au poste de police. Vous allez voir ce que l’homme peut supporter, de souffrances et de peine! Pacifiste de mes deux ! On a oublié de vous oublier! Où avez-vous mis le prince des peuples, ça fait deux jours qu’on ne voit plus à la télévision, je suis sûr que vous l’avez volé! Je vous réveille dans votre maison, dites-moi tout de suite où vous avez mis notre chef des armées, le prince des peuples, familier de la puissance du sceptre, qui laisse la troupe sans chef et qui pourrit à l’article de la mort!
(p. 61)
Elle veut sans doute de l’eau, ou à manger, cette femme, mais elle ne s’y prend pas dans les règles. Moi, si j’avais deux enfants, j’établirais des règles et je m’y teindrais moi-même, ça favorise l’éducation. Je lis dans l’expression de son visage que l’infortunée ne connaît plus aucune règle. Elle jette son regard sur l’armée mais ça n’apaise pas sa faim. Elle jette un tissu sur son visage, nous jetons tous des sacs de toile grossière sur les têtes de ces prisonniers, pour quoi faire, dans quel but, juste pour faire con? Est-ce qu’il ne suffisait pas de tous les passer à tabac? Non, il ne suffisait pas. Sûrement qu’elle ne sait même pas lire, cette femme, pensé-je par devers-moi, non je le pense tout haut. Expliquer la photo ? Vous êtes sérieux ?
(p. 97)